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Article paru dans Automates Intelligents

 


« Voyage au long de la Mort, à crédit » : CÉLINE au théâtre encore

Un homme à une table, assis, griffonnant, concentré autant que pris de rêve. Il ne restera pas assis longtemps d’ailleurs… Voilà comment débute le spectacle solo que le comédien Pier Mayer-Dantec reprend bientôt, presque cinq ans après sa création à Morlaix. Mais ici, pas de simple mise en voix de ce Louis-Ferdinand CÉLINE dont le soufre est toujours aussi actif. Pas d’immobilisme donc : nous sommes au théâtre, où les signes doivent s’entendre, les visages se marquer, les voix moduler selon la musique secrète des textes, et les corps rendre des attitudes palpables, voire idéalement indéniables.
Mis en scène par le comédien, habité de ses visions comme de la musique de Céline, de sa gouaille chaude et cruelle, râpeuse et faite pour la voix, le spectacle débute par l’ouverture de « Mort à crédit », deuxième roman de l’écrivain, pour basculer sur le premier, ce fameux « Voyage au bout de la nuit ».


Une épopée de la misère, de la terreur et de l’effroi.

C’est l’histoire d’un homme curieux de l’Homme, et qui provoque la destinée en s’engageant dans la Grande Guerre, par défi, par anarchie. Et le voici au milieu du Feu, au cœur de la grande démence, seul lucide et piégé, en quête de survie. D’une goutte de survie qui lui permettrait de penser survivre encore. Il traverse comme nu un cauchemar, un vivant cauchemar cru, qui celui-là ne se délite pas.
Histoire anti-héroïque, épopée sombre de l’effroi. Un hoquet de l’âme terrifiée, entre les ombres du Trépas.
Mais avant c’est le rire d’un médecin, son ironie crevante, sa mélancolie poivrée, sa tendresse même qui le plombe. Un homme que tout exaspère, un authentique exacerbé. Un de ceux que l’existence enrage, sorte de poète bâillonné, que le souffle épique taquine et qui voudrait bien faire rêver.

Tout Céline est déjà là, hormis ce qui fait encore tant scandale et le rend infréquentable pour bon nombre : cet antisémitisme exacerbé, obsessionnel et maniaque. Pas une seule trace dans ce spectacle. La foudre tombe bien ailleurs.
Alors, d’une énergie rageuse, autant que marquant cette compassion que l’écrivain-médecin ressentait envers les miséreux, le comédien tour à tour ironise, s’apitoie, invective, s’encolère, se désespère, s’enflamme ou s’affaisse. Tout bascule d’un instant l’autre, d’une phrase à l’autre le ton change. Plus loin c’est un récit guerrier, pénétré de l’esprit de songe comme du fantastique qui flotte. Et l’on sent les vibrations de la grande faucheuse qui rôde, en même temps qu’elle joue sa Muse. Les grands écrivains adorent la Mort, elle leur souffle de nobles pages. Céline entre tous d’ailleurs, et ici on entend sa voix autant qu’on perçoit son ombre.

 


Présentation sommaire de Pier Mayer-Dantec

Pier Mayer-DabtecD’abord musicien dans sa prime jeunesse, il devient très vite comédien. Formé à Bordeaux au cœur de la troupe du Théâtre Incarnat par Lucette Mouline, metteur en scène, dramaturge, auteur et professeur de théâtre. Nombreuses représentations au sein de cette troupe. Puis retour en Bretagne, à Morlaix. Participation à un atelier-théâtre, théâtre de rue, théâtre pour enfants… Une pièce en solo Le cabaret du Bleu Silence, sur un poème écrit par lui, long de 660 vers.
Comédien donc, mais aussi dramaturge, poète, conteur, enfin auteur.
Ce «Voyage au long de la Mort…» est son deuxième spectacle solo, et ce n’est pas son dernier :il travaille actuellement à un autre, qu’il tient plus ou moins secret.


Trois questions au comédien metteur en scène

Voyage au long de la Mort à crédit : un drôle de titre ?

Je tiens ici au terme de Voyage car c’est à une traversée mentale que nous convient ces pages. Un voyage comme une longue secousse. Au long de la mort ? On croise la mort le long des routes, entre les arbres, de tranchée à village, de nuit à nuit de rescapé. Mort, à crédit en outre. C’est que ce voyage se paye. Payer de sa peur avant de crever. La sueur de terreur avant le sang, et le tout qui se mélange dans la fange. Car la mort ne vient pas tout de suite : elle hante. Elle danse un ballet sinistre, invisible et fantomatique, et vous rend blafard et fou avant de vous décharner.

Dans quelle respiration, quelle ambiance s’inscrit ce spectacle ?

Avec Céline, c’est le désespoir. Cru. Un tableau noir vivant. Mais avec une musique : une langue populaire et gouailleuse, très proche du parlé vivant. Et aussi une petite lumière : l’incandescence du désespoir.
Entre Mort à crédit et Voyage au bout de la nuit, tout y passe, à la moulinette : famille, travail, santé, sexe, patrie. Et aussi tous les vices des hommes, les petitesses et les démences, les vacheries qui pleuvent dru. Mais sous la douche de l’humour froid. D’ailleurs, ça rafraîchit l’esprit. Et puis ça vous descend dans le corps, le long de l’échine ou en plein ventre.

Que voulez-vous montrer de Céline ?

Mon souci, mais aussi mon plaisir : faire jouer cette musique d’émotion qui gîte et bat le long des phrases. Donner à deviner Céline, qui gît là-dedans avec sa rage, une sorte de hargne jubilatoire. Et donner à penser la vie : sucée dans l’os par la vieillesse ; frôlée par les ailes de la mort, avec cette sidération devant l’hécatombe 14-18.

La littérature, souvent ça ronflonne, ça gargouille du beau, ça fait dans le précieux : ça fignole à côté de la vie. Céline, c’est brut : c’est le cri devant l’horreur du monde, l’inacceptable – l’inévitable – : la maladie, la guerre, la mort. Mais c’est aussi, parcimonieusement, la tendresse, la chance d’une caresse furtive. Et toujours c’est l’émotion.
Ça balance, entre révolte et amertume, entre rage et mélancolie, entre rouge viande et noir de tombe, en passant par le jaune vert du fiel. Le tout dans une langue populaire, qui s’offre à tous et attend une voix.
Montrer avec mon corps aussi ce que j’entends là dans les phrases. Redonner chair à ce qui m’est cher, et dans l’autre sens aussi : Redonner cher à l’écrivain-chair, dont la musique est tout enfouie.

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